Faire vieillir sa bière


A l’instar du vin, la bière est un produit qui présente des aptitudes au vieillissement. Mais comme souvent, la réalité est bien plus complexe. Si un Beaujolais nouveau ne présente aucun intérêt à la garde, il en va de même pour certains styles de bières. Et quand bien même vous auriez trouvé la ou les bouteilles sur lesquelles vous souhaiteriez jeter votre dévolu, cela ne va pas sans quelques mesures de précaution que l’on vous expose dans les lignes qui suivent.


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Les deux écoles

A l’inverse de ce que l’on pourrait croire, le vieillissement en cave de nos précieuses quilles est loin de faire l’unanimité au sein du vaste monde de la bière. Si certains ont su y trouver leur compte, d’autres en revanche n’y trouvent qu’un intérêt limité pour ne pas dire nul, considérant qu’une bière doit être bue peu de temps après son conditionnement, c’est-à-dire « fraiche ». Mais laissons de côté cette orthodoxie quelque peu ennuyeuse, pour s’intéresser à l’autre école pour qui le vieillissement n’est pas considéré comme une hérésie mais au contraire comme un moyen d’explorer de nouvelles saveurs. Car la bière peu présenter des aptitudes au vieillissement, c’est indéniable, encore faut-il savoir laquelle…

Quelles bières ?

Exit les bitters, les wits, les pils et les lagers, ces dernières étant généralement trop légères, c’est-à-dire peu alcoolisées pour une garde en cave. Nuance cependant, car les gueuzes et autres bières de fermentation spontanée sont particulièrement indiquées pour le vieillissement bien que titrant en moyenne entre 4% et 6% (il existe quelques exceptions comme la Geuze Maria Parfait de la brasserie Frank Boon par exemple titrant 8%). La raison ? La présence des brettanomyces ou saccharomyces, levures sauvages gourmandes en sucres et responsables de ces flaveurs fermières de pomme verte, de poire et d’étable. Ces breuvages vieillis en foudre de chêne peuvent ainsi subir une seconde fermentation en bouteille pour notre plus grand plaisir. Souvent la présence de bretts constitue un bon indice sur la capacité d’une bière à vieillir. L’Orval en est un exemple éloquent, étant elle même constituée de bretts. En revanche, les inconditionnels d’IPA sous toutes ses formes devront laisser de côté leur jolie amertume. Car paradoxalement, si le houblon est un conservateur naturel, ses propriétés aromatiques s’affadissent avec le temps, conférant à la bière des notes de feuille séchée. Pas vraiment le pied… Alors vers quoi se tourner ?

Le poids des ages, le pouvoir du temps
Le poids des ages, le pouvoir du temps

En règle générale, il est préférable de privilégier les bières à fort taux d’alcool, c’est-à-dire à partir de 7%. Parmi les styles présentant un bon potentiel de vieillissement, les dubbel, triples et autres bières trappistes sont des candidates idéales. Ainsi, il vous sera très facile de tenter l’expérience sur plusieurs bouteilles de 10 de Rochefort, de St Bernardus 10, d’Archel, ou de Westmalle triple afin de gouter leur changement dans le temps. La liste est longue, et vous n’aurez que l’embarra du choix, tout dépend bien-sûr des arômes que vous souhaitez découvrir. Les barley wine présentent eux aussi des profils intéressants en raison de leur sucrosité, de leur taux d’alcool élevé (minimum 8% à l’instar de la Old Fogorn de chez Anchor), ainsi que pour leur équilibre malt/houblon. Les malts pâles et foncés donneront tour à tour des flaveurs madérisées, de confit, de xérès, de miel vieilli, de cuir mais aussi de carton humide, ici principal défaut. Même son de cloche pour les Imperial Stout, les Imperial Russian Stout, les Sweet Stout et autres bières lourdes vieillies en fûts de spiritueux. Une seule règle doit vous guider, fiez vous à votre nez et non à celui des autres. Votre expérience du vieillissement est par dessus tout une affaire personnelle mais surtout de gout !

La magie des bretts !
La magie des bretts !

 Vieillir, mais dans quelles conditions ?

Les conditions de vieillissement sont presque aussi importantes que le choix de bouteilles elles mêmes. Préférez un endroit calme, isolé (pour éviter la tentation) et à l’écart des mauvaises odeurs comme celles dégagées par les produits ménagers. Mais avant tout, veillez à ce que vos quilles restent dans une pièce sombre à l’abri de la lumière, ennemie jurée du houblon. Privilégiez une température stable (13° est la température de conservation idéale) plutôt que des écarts importants. Le taux d’humidité quant à lui ne doit pas être trop élevé ce qui risquerait d’oxyder vos capsules, et une pièce trop sèche rendra le liège friable. Les bouteilles doivent être conservées à la verticale pour les bières à capsules, et couchées pour celles dotées d’un bouchon de liège. Pour la suite la nature fera le reste !

Infographie Skumenn

Cet article a 5 commentaires

  1. Antoine Audusseau

    Merci pour cet article très intéressant ! Je vais essayer de tenter ça 😉

  2. chevestrier

    pour des brasseries connue pas de problèmes mais pour des petites brasseries qui viennent de se lancer ( et heureusement qu’il y en as )
    attention au vinaigre très rapidement obtenue juste bon pour les cornichons !

  3. Zarski

    Bonjour

    je voudrais savoir c’est que vous pensez sur les vieillissement des EKU

    MERCI

  4. brice Lallemand

    Bonjour,
    Même les bouteilles à bouchons doivent être stockées debout car les bouchon sont en synthétique. Sauf si l’on souhaite accentuer la surface de contact de la levure.

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